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Une nuit avec toi

Couple : Takami Ichiro x Sakuraba Haruto

Genre : AU / Romance / Yaoi

Rating : M (langage, scène de sexe et autres joyeusetés !)

Auteur / Scénario : Jijisub

Nombre de Chapitres publiés : 3

Statut : en cours...

Disclamer : Eyeshield21 appartient à Yusuke Murata / Ruchiro Inagaki et les OC de cette fic m’appartiennent…

 

Hum, j’ai décidé de faire un petit tour sur le fandom d’Eyeshield. J’avoue que le couple Sakuraba x Takami est intéressant… et j’ai eu cette  petite idée en discutant avec une amie sur un sujet qui n’avait rien à voir ! Comme quoi… J’espère que cette histoire vous plaira. Je vous en souhaite bonne lecture…

 

Synopsis :

Haruto Sakuraba est un jeune secrétaire qui vient d’être embauché dans l’Oujo Corp., société spécialisée dans les arts de la table de luxe. Il a fêté l’événement tant et si bien que le lendemain, lorsqu’il se réveille et se découvre dans le lit d’un homme… Il prend la fuite, sans connaître l’identité de son amant d’une nuit.

 

 

Takami x sakuraba by satanpetiteflore

Chapitre 1

 

Un gémissement sourd franchit les lèvres de Sakuraba. Son cerveau allait éclater ! Se tournant dans son lit pour essayer de trouver une meilleure position, il crut qu’il allait basculer dans le vide. Sans conteste, il avait picolé comme un trou la veille au soir, mais c’était à quel sujet déjà ? Ah oui… Son stage était terminé, maintenant il était salarié !

 

Une de ses mains passa sur son visage fatigué, et c’est avec difficulté qu’il leva une paupière. La lumière crue du petit jour lui agressa la rétine. Il n’avait pas fermé les doubles rideaux ?

Au fait, il était rentré comment la veille au soir ? Se creusant les méninges Haruto ne rencontra que de minces filets de souvenirs, aussi consistant que la brume.

 

Le jeune homme remonta la couverture blanche et allongea ses longues jambes. Un mouvement à côté de lui, le figea. Avait-il ramené quelqu’un avec lui ? Sakuraba fit à nouveau l’effort d’ouvrir les yeux. Avait-il terminé la soirée avec Hinamori ? Ils avaient après tout bien discuté ensemble pendant une bonne partie de la soirée.

 

Blanc ? La couleur l’interpella brutalement dans les limbes de sa migraine. Blanc ? Des draps Blanc ? Sakuraba ouvrit les yeux brutalement et s’assit sur le lit. Bien vite, ses mains enserrèrent sa tête et un nouveau gémissement de souffrance franchit ses lèvres. Un hoquet le traversa, et c’est avec difficulté qu’il ravala sa bille. Un grognement attira son attention.

 

Le timbre même de la voix le figea. Rauque ! Et une fraction de seconde plus tard, son cerveau analysa une douleur particulière en bas de son anatomie. Le sang quitta son visage. Ce n’était pas possible ! Son impression d’être soûle encore, disparue brusquement. Lentement, il tourna son visage et observa la forme allongée à l’autre bout d’un immense lit.

 

Les épaules larges et musclées le tétanisèrent. Ses yeux enregistraient malgré eux les moindres détails… Cheveux courts couleurs d’encre en bataille, et une jambe interminable et poilues qui débordaient des couvertures ! Un mec ! Il s’était fait enculer par un mec !

 

Comment cela pouvait-il être possible ? Jamais… Oh non jamais, il n’avait été attiré par le moindre mec de sa vie. Alors… alors que faisait-il là ? Son cœur cognait à un rythme fou. Il devait se casser et rapidement. Enfin pas trop pour ne pas réveiller son amant d’une nuit.

 

C’est avec précaution que le jeune homme glissa hors du lit. Ses jambes flageolaient sous le coup de l’alcool dont son organisme ne n’était pas débarrassé, mais aussi sous le coup de son émotion. Son cerveau refusait de faire l’analyse qui s’imposait. Comment avait-il fini dans le lit d’un mec ?

 

Son regard fouilla la pièce immense. Sakuraba s’aperçu que la chambre était luxueuse… et ses vêtements gisaient sur le sol comme arraché par un élan de passion. Haruto ramassa ses affaires avec cette horrible sensation aux fesses. Refusant de tirer les conclusions qui s’imposaient, il s’habilla et vérifia qu’il avait toutes ses affaires.

 

L’homme allongé, dormait toujours profondément pour son plus grand soulagement. Se retirant sur la pointe des pieds, il traversa l’appartement cossu. Les pièces étaient immenses et décorées avec goût, avec une dominance du blanc qui donnait une impression impersonnelle au lieu. Enfin, en comparaison le sien paraissait bien triste à côté, songea-t-il amer. Une fois dans le genkan[i] , il se chaussa et fouilla dans ses poches pour retrouver son portable.

 

Réussissant à franchir le seuil sans bruit, Sakuraba resta une seconde sur le palier indécis. Devant lui, se tenaient quatre entrées aux portes ouvragées. Qui pouvait-être son amant ? Son regard s’arrêta sur l’issu de secours. Pas question qu’il utilise l’ascenseur. Moins il se ferait remarquer, mieux ça serait. Les marches défilèrent et sa progression ressemblait à une cavalcade.

 

Une fois au dehors, un immense soupir de soulagement franchit ses lèvres. Sakuraba tourna son visage vers l’immeuble et s’aperçut qu’il se trouvait dans les quartiers très chics de Ginza. D’une main, il interpella un taxi, de l’autre ses doigts glissaient sur l’écran de son Smartphone. Un message d’Hinamori s’y trouvait. Mais qu’avait-il foutu la vieille au soir ?

 

Installé sur le siège arrière du véhicule, Haruto passa ses mains sur son visage. Il devait vite oublier ce qui s’était produit cette nuit. Quoiqu’il n’avait qu’à occulter son réveil uniquement, parce qu’à part un grand trou noir, sa mémoire ne contenait pas grand-chose. Avait-il été drogué ?

 

Il contacterait Hinamori plus tard, et tout rentrerai dans l’ordre ! S’enfuir le plus rapidement de ce lieu, où il avait perdu sa seconde virginité… Une envie de vomir le gagna. Sakuraba croisa les jambes et grimaça. Il observa ses mains, inquiet… Avaient-elles vraiment caressé le corps d’un homme ? L’idée même lui tordit l’estomac à nouveau.     

 

Le chauffeur lui signala qu’il était arrivé. Sakuraba fouilla dans ses poches et tendit quelques billets, avant de sortir l’esprit complètement ailleurs. Son regard se porta vers son immeuble apaisé. Il traversa le trottoir d’un pas élastique et grimpa dans l’ascenseur le plus calmement possible. Une fois dans son petit apatō[ii], il déchira presque son costume pour se précipiter sous la douche. Le jet brûlant ne parvenait pas à enlever cette curieuse impression qui l’habitait depuis qu’il avait le somptueux duplex. Qui était le type avec qui il avait couché ?

 

Toute la soirée fut repassée dans le détail. L’exaspérante discussion avec Hiruma, la nervosité évidente de Kobayakawa pour il ne savait quelle raison, et enfin la magnifique Mamori et les nombreux verres que lui avait versé Taki. Quoiqu’il n’avait pas eu besoin d’être poussé. Le soulagement qu’il avait ressenti lorsqu’il avait appris qu’il était embauché… Bref, tout était parfaitement clair dans son esprit, et puis cette envie de vomir qui l’avait pris brusquement.

 

Mais que c’était-il passé ensuite ? Tout cela restait un mystère… En attendant, il se frottait le corps aussi fort qu’il le pouvait. Hors de question qu’il garde le moindre souvenir de cette soirée. Voilà, il devait tout oublier. Pas moyen qu’il puisse coucher avec un homme, il devait se trouver une copine et rapidement. Lorsqu’il sortit de la salle de bain, Haruto se sentait plus calme, et c’est toujours aussi serein qu’il invita Hinamori à sortir avec lui le jour même.

 

« Il n’en est pas question ! Répondit sèchement la jeune femme.

—     Mais…

—     Tu m’as laissé choir comme une chaussette ! Coupa Hinamori furieuse. Je t’ai attendu une heure, et tu n’es pas revenu. Où étais-tu passé ? »

 

Sakuraba déglutit. Il n’allait pas dire qu’il s’était réveillé dans…

 

« Une chance, Hiruma-san m’a ramené chez moi. »

 

En entendant le nom du responsable commercial, Haruto se crispa.

 

« Et… Qu’avez-vous fait ?

—     C’est toi qui me demande ça ? Il ne s’est rien passé ! Hiruma s’est conduit comme un parfait gentleman. Et toi, où étais-tu ? Tu ne m’as toujours pas répondu.

—     Je ne sais pas. Avoua Haruto et ce n’était même pas un mensonge. Je me souviens uniquement avoir été malade, et j’étais parti prendre l’air… après, plus rien.

—     Je t’ai cherché autour du restaurant…

—     Je ne sais pas ce qui s’est produit Hinamori. Crois-moi… »

 

Un silence s’installa entre eux. Visiblement, la jeune femme réfléchissait et analysait la situation.

 

« Bon… Je veux bien te croire. Que me voulais-tu ?

—     Je voulais t’inviter cet après-midi dans un salon de thé…

—     Vraiment ? »

 

Sakuraba perçut le sourire derrière le combiné.

 

« Oui… Enfin, si tu avais quelque chose d’autre de prévu.

—     Non, non… Je serai ravie de sortir avec toi.

—     On se rejoint devant le Tokyo dôme…

—     Ok ! Pour quelle heure ?

—     Euh, disons 15 h ?

—     Super ! À tout à l’heure. »

 

Se laissant choir sur son lit, Sakuraba se gratta le haut du crâne, et repoussa ses cheveux mi-longs châtains. Il l’avait échappé belle. Depuis le temps qu’il tournait autour de l’assistante commerciale.

 

°°O0O°°

 

Les semaines passaient et Haruto avait tout oublié de son malheureux incident. Hinamori et lui fleuretaient ensemble… Et puis, sa vie professionnelle prenait un tournant vraiment intéressant avec Seijuro Shin, le Chef du personnel, également son chef direct, même s’il était exigeant avec lui, il forçait son admiration.

 

Largement plus petit que lui, il le surplombait dès qu’il devait le suivre dans un couloir. Quoique… Dans cette entreprise, bien rare était ceux qui le dépassaient. Otawara et Rykan étaient les deux seuls à la production à devoir le surpasser en taille. Quelque fois, il se sentait mal à l’aise. Certainement dues à quelques réflexions désobligeantes sur son physique, provenant d’ailleurs la plupart du temps des hommes…

 

Sa réputation auprès des femmes était tout autre. Il était apprécié de la gente féminine. Et ses conquêtes se succédaient à un rythme soutenu. Enfin, ça c’était les films que certaines secrétaires ou autres personnels féminins se formaient dans leurs têtes. Oui… Soupira intérieurement Sakuraba en franchissant le seuil du service commercial mal à l’aise, il n’avait qu’Hinamori dans sa vie, même s’ils n’avaient pas encore franchit le pas.  

 

Rien ne tournait en sa faveur, soit des appels intempestifs venaient gâchés l’instant, comme si une malédiction planait au-dessus d’eux, ou bien une migraine de la jeune femme parce que trop épuisée par les heures qu’Hiruma lui faisait faire, ou bien… les circonstances ne se prêtaient pas à la chose. Enfin soupira à nouveau Haruto, il finirait bien par trouver franchir le pas un jour. Son regard tomba sur Hinamori et il jura entre ses dents.

 

Elle venait de quitter son Chef, et paraissait sur les nerfs une nouvelle fois. Hinamori ne le remarqua même pas. Haruto traversa le grand bureau ouvert où toute l’équipe commerciale écoutait les directives d’Hiruma, le grand « Ya-hhaaa ! » à la fin de son discours fit sursauter Sakuraba.

 

« Hiruma-san… Commença Haruto en se dégageant la gorge, alors que tous les commerciaux regagnaient leurs bureaux pour récupérer leurs affaires. Shin-san m’a demandé de vous transmettre les dossiers de candidatures qui ont été retenu pour la prochaine campagne de recrutement de la compagnie.

—     Dit lui que j’ai déjà trouvé mes prochains larbins !

—     Pardon ? »

 

Le blond ricana et contourna son bureau, pour s’asseoir confortablement sur son fauteuil en cuir. Il détailla de haut en bas son interlocuteur, et visiblement pas à l’avantage du jeune homme. Sakuraba se sentit rougir devant l’air narquois du responsable commercial.

 

« Dites à Shin Seijuro que je m’en fou de ses fuckings candidatures ! J’ai trouvé mes propres larbins… J’n’ai besoin de personnes pour trouver mon personnel.

—     Mais… Shin-san vous demande de, de… Commença Haruto dérouté par l’air indifférent à présent d’Hiruma, et lui tendant malgré tous les dossiers qu’il avait pris le soin de prendre avec lui.

—     Au fait Sakuraba… j’voulais savoir… »

 

Le cœur d’Haruto se mit à battre très vite, en voyant l’air faussement préoccupé du commercial. Que lui voulait ce type tordu ?

 

« Votre postérieur à l’air de mieux se porter…

—     Pardon ? »

 

Sakuraba était devenu blême, et Hiruma se pencha sur son bureau et chuchota derrière sa main.

 

« Oui, votre petite sauterie de la dernière fois…

—     Je ne vois pas de quoi vous parler, Hiruma-san.

—     Vraiment ? » Ricana le blond en basculant son fauteuil.

 

L’homme tira de son tiroir une enveloppe brune.

 

« J’crois qu’ça, ça va te rafraichir la mémoire… Vous formiez un très joli couple, je dois dire ! »

 

Sakuraba fixait l’enveloppe qui avait été jetée sur le bureau devant lui. Le jeune homme avait l’impression qu’il se brûlerait les doigts en la prenant. Il se racla la gorge et déclara en regardant le commercial droit dans les yeux.

 

« Je ne vois vraiment pas de quoi vous voulez me parler !

 

Et sans se démonter, il posa devant Hiruma l’air très déterminer ses dossiers afin qu’il soit lu. Haruto ne baissa pas les yeux, malgré l’air ironique du commercial.

 

« Shin-san attend votre réponse dans la journée !

—     Que dirai notre chère Hinamori, si elle voyait ses photos compromettantes où on te voit embrasser passionnément un mec ? »

 

Sakuraba en perdit son souffle. Son air déconcerté et l’incrédulité dans son regard, firent rire doucement le commercial. Hiruma se pencha en avant et colla son front contre celui du secrétaire.

 

« Je vois que tu t’en souviens maintenant ? À ta place, je regarderai… et je réviserai mon jugement.

—     Mais… mais qu’est-ce que vous attendez de moi ?

—     Ça tu le sauras quand je te sifflerai ! En attendant, prend cette enveloppe avec toi, et sache que j’en ai des doubles et bien sûr les négatifs… Si tu ne veux pas les voir afficher, placarder sur tous les panneaux d’affichage de l’entreprise, je te conseille d’être obéissant lorsque je te le demanderai. »

 

Sakuraba se redressa et après quelques secondes d’hésitations, il se saisit de l’enveloppe brune. Il ne prit pas la peine de l’ouvrir et quitta la plateforme, sous le regard scrutateur de quelque commerciaux encore présents, qui le suivait avec pitié. Le cœur battant à tout rompre, Haruto franchit le seuil de son bureau alors que Seijuro sortait du sien.

 

« Vous êtes de retour ? Hiruma a pris les dossiers ?

—     Oui…

—     Il va me donner une réponse aujourd’hui ? Demanda l’homme sans se départir de son masque flegmatique.

—     Je… il a dit qu’il avait trouvé ses propres candidats…

—     Qu’avez-vous fait ? Interrogea Seijiro calmement.

—     Je les ai posés devant lui. »

 

Shin observait l’air défait de son secrétaire. Ses yeux s’attardèrent sur l’enveloppe qu’il serrait contre lui. Il faillit soupirer, mais s’en abstint.

 

« Ce n’est pas une enveloppe qu’Hiruma vous aurez donné pour vous faire chanter par hasard ?

—     Pardon ? S’étonna son secrétaire.

—     L’enveloppe que vous tenez en main…

—     Ah non ! Je… Excusez-moi, c’est… c’est… une enveloppe que Mademoiselle Himuro m’a donné et…

—     Bien. J’ai un nouveau problème avec mon ordinateur… Je crois que je vais demander à ce qu’il soit changé… Plus rien ne fonctionne.

—     Oh laissez-moi regarder Shin-san. Je suis sûr qu’il ne s’agit de trois fois rien. »

 

Shin haussa un sourcil, mais ne répondit rien. Il observait son nouveau secrétaire se précipiter dans son bureau pour réparer une nouvelle fois son ordinateur. Son regard s’attarda sur le bureau qu’occupait son secrétaire. L’enveloppe trainait sur le coin de la table. Devait-il croire l’excuse bidon de Sakuraba ? Devait-il intervenir auprès d’Hiruma ?

 

Non, il laisserait Haruto se débrouiller, enfin si cela allait trop loin… Il interviendrait. Il ne connaissait pas beaucoup de personnel capable de rectifier les conneries qu’il accumulait avec ce foutu matériel informatique pour lequel il ne comprenait rien ! Shin respira un grand coup, et rejoignit Sakuraba qui se tournait vers lui tout sourire.

 

« C’est bon… Votre ordinateur fonctionne à nouveau. Voulez-vous que je rentre les heures de la production à votre place ? J’ai terminé de mettre en page le tableau de bord que vous m’aviez demandé ce matin.

—     Cela m’arrangerait. J’ai été convoqué dans le bureau de Takami Ichizo. Prenez mes messages, je répondrai si c’est important.

—     Bien ! »

 

Shin quitta la pièce, et Sakuraba regagna son bureau. Il fixait l’enveloppe. Dans cette dernière il découvrirait enfin le visage du type avec lequel il avait passé la nuit. Et s’il le croisait tous les jours ? Mais qui dans cette société pouvait se permettre de se payer un appartement comme celui là ? À moins d’être le directeur de la boite… et le vieux Takami Ichizo avait les cheveux blancs… pas couleur de jais, comme ceux de l’homme.

 

« Aaahhhh, j’en ai marre à la fin ! » S’exclama Haruto exaspéré.

 

Prenant l’enveloppe d’un geste brusque il l’ouvrit presque rageusement, mais c’est le cœur battant qu’il tira les clichés en partit et resta cloué au sol. Pas de méprise possible. C’était bien lui, et il encerclait les épaules d’un type qui devait être aussi grand que lui. Impossible de savoir qui il était ! Son visage était en parti caché, mais même… qui portait des lunettes et était aussi grand que… que…

 

Sakuraba rangea les photos dans l’enveloppe et les glissa dans sa sacoche d’une main tremblante. Une panique qu’il ne se connaissait pas s’empara de lui. Hiruma allait le faire chanter ? Comment allait-il se sortir de là ? Ses mains transpiraient tellement, qu’il se leva pour aller aux toilettes. De toute façon il devait se reprendre…

 

Lorsqu’il regagna son bureau, il vit celui de Shin toujours ouvert, lui signalant que son chef n’était toujours pas rentré de sa réunion. Sakuraba pour évacuer l’image des photos qui le poursuivait, décida de se plonger à corps perdu dans son travail.

 

°°O0O°°

  

Installé sur son canapé, des photos au travers de la table basse en vrac, Sakuraba s’enfilait son troisième verre de whisky cul sec. Merde ! Qui était-ce type ? Et pourquoi arborait-il cette expression abandonnée ? Il était évident qu’il prenait du plaisir à être enlacé par cet… cet homme. Et pourquoi ne se souvenait-il définitivement de rien ?

 

Son téléphone sonna, et d’une voix absente il répondit. Une voix inconnue se fit entendre à l’autre bout du fil.

 

« Sakuraba Haruto ?

—     C’est moi… Ichiro… »

 

Le cœur du jeune homme se mit à battre sourdement. Ses yeux se portèrent sur les photos qui se trouvaient sur la table basse. Sa main tremblait. Il ne connaissait pas d’Ichiro.

 

« Takami Ichiro… Je…  Un rire gêné s’éleva. Je suis désolé de prendre de tes nouvelles seulement maintenant, mais je ne voulais pas que tu sois surpris demain, lorsque nous nous rencontrerons au bureau… »

 

Seul le silence répondit. Sakuraba avait l’impression d’entrer dans une spirale où son cerveau lui envoyait des images qu’il avait oubliées jusqu’ici.

 

« Sakuraba ? Tu es…

—     Qui êtes-vous ? »

 

Haruto tremblait de tous ses membres, et c’est avec incrédulité qu’il avait posé la question. Il savait à présent, mais il repoussait cette vérité avec force. C’était impossible… Il avait couché avec le fils aîné du patron !

 

                                                                                                                                              



[i] Genkan = entrée japonaise

[ii] Apatō = appartement japonais.

Chapitre 2

Installé devant son bureau et triant les feuilles d’arrêts maladie afin de les classer à nouveau dans l’armoire, Haruto essayait de faire abstraction à tout ce qui l’entourait. En fait, même s’il essayait de garder son calme, il savait qu’il serait confronté d’ici à quelques heures, à Takami Ichiro. Une nouvelle fois une boule se forma au fond de sa gorge. Il envoya valser toutes ses angoisses et repris son travail avec sérieux.

Mais même en s’acharnant sur son classement, la conversation téléphonique qui avait eut lieu la veille lui revint en mémoire. La voix grave de Takami le poursuivait sans qu’il puisse y faire quoique ce soit.

« Qui je suis ? S’était-il étonné. Mais… enfin, nous avons eu une aventure et…

—    Et qu’est ce que vous espériez ? Vous disparaissez et vous revenez comme ça, inopinément, du jour au lendemain ?

—    Non, non… je suis sincèrement désolé que mon comportement puisse te blesser, mais tu vois, je n’ai pas eu le temps et…

—    Et comme vous revenez dans la société et que vous risqueriez de me rencontrer, vous voulez acheter mon silence ? Termina sèchement Haruto qui se demandait lui-même à quoi il jouait.

—    Non, ce n’était pas mon intention… Comme je te l’ai dit ce soir là, je devais me rendre à Hiroshima et je n’avais pas le temps matériel de te recontacter. Je ne voulais pas te mettre devant le fait accomplie d’autant que je t’avais promis de te recontacter pour nous revoir. Je suis vraiment désolé que cela se passe de cette manière.

—    Je pense surtout que nous n’aurions pas du nous revoir tout court. En fait… je vous avais oublié. Cela n’aurait pas été un choc pour moi de ne plus avoir de vos nouvelles. Écoutez… faisons comme si rien ne s’était passé. Nous allons en rester là. Vous n’êtes rien pour moi, et je ne suis rien pour vous qu’une aventure d’une nuit, alors… je vous remercie de votre prévenance, mais autant en rester là. »

Haruto avait raccroché au nez de Takami, et s’était mordu la lèvre, juste après. Et si cela rejaillissait sur sa carrière ? Non, il n’était pas ce genre là… Tant pis, s’il perdait son emploi… Quoiqu’il fanfaronnait, mais en avait-il les moyens ? Il n’allait pas… comment avait-il pu se faire enculer par un mec ? Il avait beau essayé de se souvenir de cette nuit-là, mais aucun fragment et même une étincelle de souvenir n’effleurait sa mémoire.

À présent, il sursautait au moindre claquement de porte, de peur de voir débouler Takami et de peur de lui faire face, alors qu’il s’était comporté comme un pleutre. Si seulement, il n’avait pas été à cette soirée ! Mais une chose était sûre, c’est qu’il ne touchait plus à une goutte d’alcool, ou s’il était obligé c’était avec parcimonie.

La matinée défila comme une flèche, jusqu’à ce que Shin se présente devant la porte.

« Sakuraba, nous sommes tous convoqués au réfectoire.

—    Ah… j’arrive. »

Le cœur de Haruto se mit à cogner très fort dans sa poitrine. Il posa ses dossiers sur son bureau, et suivit Shin après avoir soigneusement fermer à clef son bureau. Lorsqu’ils entrèrent dans la grande salle, tout le personnel était présent. Sauf quelques commerciaux disséminés dans le pays. Au grand soulagement du secrétaire, Hiruma n’était pas présent. Son regard balaya la salle et il s’aperçu qu’une petite estrade avait été monté dans le fond du réfectoire.

Imposant Ichizo Takami fit son entrée, immédiatement le silence prit place. Le conseil d’administration apparu et soudain le cœur de Sakuraba cessa de cogner dans sa poitrine. Un homme qui devait être aussi grand que lui, pénétra dans la salle. Son costume taillé sur mesure et de grande marque mettait en valeur sa silhouette athlétique. C’était déroutant, d’autant que ce type avait une tête de premier de la classe.

Il remontait ses lunettes du bout de son index, et s’installait à côté de son père. Ce dernier discutait avec Akaba Hayato. Que se préparait-il encore ? Sakuraba essaya de se faire tout petit pour éviter de se faire remarquer. Mais, comme à son habitude, les regards se posaient immanquablement sur lui. Le regard sombre de Takami passa sur lui, comme s’il ne l’avait pas vu. Un froid rempli se saisit d’Haruto. Ce type ne l’avait pas vu ?

Attends, attends, attends… C’était merveilleux ! Il allait avoir la paix… pas à se justifier, si Takami l’ignorait, il n’aurait pas à se justifier ou… Une certaine sérénité l’envahit, et il se laissa aller à une pause plus décontractée. Le jeune homme ne remarqua même pas le regard en coin que lui lançait Shin, trop occupé à ses pensées agitées.

Le vieil Ichizo s’approcha du micro installé et toussota discrètement avant de s’adresser à près des trois cent salariés amassés pour l’occasion.

« Bonjour à toutes et tous… Je vous ai fait venir aux réfectoires pour m’adresser à vous, puisque les salles de réunion sont trop petites pour vous recevoir tous. Je ne resterai pas très longtemps. Je sais que vos pauses déjeuner sont courtes pour certains. Donc, je vous annonce que je vais quitter le siège de la société pendant quelques mois. Je dois partir pour les Etats-Unis, l’Arabie Saoudite et la Chine pour trois gros contrats qui sont très importants pour pérenniser notre société. Vous n’êtes pas sans savoir que la crise à mis à mal notre trésorerie, et qu’il est important pour nous aujourd’hui de nous exporter, et faire valoir notre savoir-faire. De ce fait, j’ai demandé à mon fils Ichiro ici présent, de me remplacer à la tête de l’entreprise le temps que je négocie ses importants marchés. J’ai aussi une mauvaise nouvelle à vous annoncer. Plusieurs emplois seront supprimer durant les prochains mois, et certains postes ne seront pas remplacer après les départs à la retraite. Pour l’instant, il n’y a que le service administratif qui sera touché. Pour la production, vous serez informé en temps et en heure par mon fils… À moins qu’entre temps, de nouvelles commandes aient lieu, mais je ne suis pas comme les occidentaux, je ne crois pas au Père Noël. »

Un mouvement s’était créé parmi les employés, et un murmure avait parcouru le réfectoire. Sakuraba pour sa part, était devenu très pâle. Il retirait tout ce qu’il avait dit précédemment. Il avait besoin de son job ! S’il était viré surtout à l’heure actuelle, comment ferait-il pour trouver un autre travail ? Il n’avait pas assez d’expériences à valoriser. Le discours avait repris et chacun se tu pour écouter la suite.

« Je ferai en sorte qu’il y ai le moins de licenciement possible. Notre entreprise est une entreprise familiale et aucun fond étranger ne menace directement notre société. Je vous demande de nous faire confiance. Quoiqu’il en soit, vous serez tenu très vite au courant. Sur ce, je laisse mon fils prendre la parole. »

Le regard de Sakuraba, comme de tous les employés se focalisèrent sur la haute stature athlétique qui s’avançait sans peur devant le micro. L’homme tenait des notes à la main, mais ne les plaça pas devant les yeux, préférant s’adresser à ses employés directement.

« Bonjour, je me présente, Ichizo Takami. Je serai votre patron par intérim durant une période approximative de huit à douze mois. J’espère que nous pourrons travailler ensemble dans les meilleures conditions possibles, malgré les circonstances. Je voulais simplement vous avertir que les personnes concernées par un licenciement seront convoqués à mon bureau dans le courant de la journée. Je vais vous laissez manger, et je commencerai à vous recevoir des quatorze heures. En attendant, je vous souhaite un bon appétit. »

Bon appétit ? C’était un crétin ce mec ? Haruto était sûr que le regard de Takami s’était arrêté sur lui quelques secondes. Pas très longtemps à peine quatre secondes, mais le choc du regard sombre l’avait ébranlé. Il allait être sur la liste ! Putain, il avait des économies, mais elles n’étaient pas mirobolantes. Son cerveau fonctionnait à toute vitesse. Shin l’interpella, et il se tourna vers son chef qui restait de marbre.

« Allons déjeuner… inutile de nous apitoyer sur notre sort. »

Bien sur, il pouvait parler comme cela… son poste n’était pas menacé contrairement au sien. Sakuraba prit un plateau et se retrouva avec un une assiette bien garnie. Assis à côté de Shin, il allait lui poser de plus amples questions, lorsqu’il sentit une présence à ses côtés, tournant son visage, il eut l’occasion de voir Ichizo Takami à côté de lui, avec un plateau dans les mains.

« Nous nous joignons à vous Shin-san. Vous n’y voyez pas d’inconvénient ?

—    Bien sur que non, Takami-sama. »

Sakuraba allait se reculer pour laisser la place, mais Ichizo devança son geste et déclara promptement.

« Restez à votre place, jeune homme. Je n’ai nulle intention de vous chasser de votre place. Ah… Ichiro vient te joindre à moi. Tu auras l’occasion de parler avec Hayato tout à l’heure. »

Haruto leva les yeux et rencontra le regard indifférent de Takami. Ce dernier ne s’attarda pas sur lui de toute manière. Il écoutait la conversation qui avait lieu entre Shin et Takami père sur les futures restructurations à venir. Lui restait silencieux et attendait que les temps passe. Ce jour, n’était vraiment pas une bonne journée pour lui. Voyant l’heure tournée, Sakuraba s’excusa et quitta la table poliment.

Ses jambes étaient en coton, et sincèrement il n’avait rien compris à la conversation qui s’était déroulée devant lui. D’ailleurs, il se fit arrêter par Taka Honjou et Reiji Marco. Ils étaient visiblement très nerveux.

« Sakuraba ! Tu en sais plus sur les licenciements à venir ?

—    Quels sont ceux qui seront licencié ?

—    Je n’en sais rien ! Ils n’ont pas parlé de cela à table ! Répondit fermement le secrétaire. Il contourna l’informaticien et l’expert comptable.

—    Mais… attends ! Tu es au service du personnel… fit remarquer Taka légèrement contrarié. Tu devrais être parmi les premiers au courant.

—    Je ne savais rien avant d’être convoqué comme vous ici…

—    Et à table, ils ont bien du parler des restructurations ? Remarqua Marco.

—    Messieurs, vous êtes à des postes plus importants que le mien, et normalement l’encadrement devrait en savoir plus qu’un simple employé… alors, non je ne suis au courant de rien ! »

Excédé Sakuraba s’éloigna en de longues enjambées distançant ses poursuivants. Mais, la voix féminine d’Mamori l’immobilisa.

« Sakuraba… Tu étais au courant ? »

Haruto laissa l’assistante commerciale le rejoindre. Elle paraissait essoufflée comme s’il elle revenait de loin.

« Non, pas du tout. »

Le jeune homme repris sa route, Mamori à ses côtés. Elle paraissait très nerveuse. En fait, toute la société semblait à présent sur des charbons ardents. Lui-même était préoccupé. Il ne savait pas comment il pourrait faire face à ce type de situation. Sa vie était censé être réglé comme du papier à musique et là… Quoique depuis quelques temps ses certitudes s’écroulaient comme un château de cartes.

Une main se logea dans le creux de son bras, surprenant Sakuraba. Il s’arrêta à nouveau et observa étonné Mamori qui semblait trembler.

« Ecoute, Anezaki… je… je suis dans le même état d’esprit que toi actuellement. Je ne sais rien, et j’ai les mêmes craintes que toi. Alors s’il te plaît… pouvons-nous en parler plus tard. Mon chef va certainement rentrer de bonne heure à son bureau, et j’ai un tas de dossiers que je dois continuer à ranger. »

Sakuraba repris sa route, et entra enfin dans son couloir. Mamori le suivait à quelques pas derrière lui. Il se tourna vers elle

« Tu aurais autre chose à me dire ?

—    Non… Enfin si… Tu serais libre ce soir pour prendre un verre ? »

Un sourire s’afficha sur les traits de Haruto. C’était la première fois qu’Anezaki lui proposait d’elle-même de sortir après le travail.

« Avec grand plaisir… cela me fera oublier les mauvais moments de cette journée. A tout à l’h…. »

Sakuraba suspendit ses paroles et fixa la poignée de la porte qu’il venait de tourner inconsciemment. Elle s’était ouverte. Haruto fronça les sourcils. Il était sûr d’avoir fermé cette porte !

« Quelque chose ne va pas Sakuraba ?

—    La porte est ouverte…

—    Tu l’avais fermé ? S’inquiéta Anezaki.

—    Certain ! Je fais toujours attention que tout soit soigneusement fermé. S’il te plaît peux-tu retourner à ton bureau, je vais vérifier que rien n’ait été volé. »

Haruto entra et salua une dernière fois Mamori avant de faire le tour du bureau. Les dossiers qu’il avait laissés sur le bureau étaient exactement à la même place. Il ouvrit les portes des placards, et vérifia tous les points stratégiques où les documents confidentiels se trouvaient. Rien, tout était à sa place. Lorsque la porte de son bureau s’ouvrit, il était planté au milieu du bureau, ma mine préoccupée. Que s’était-il passé ?

« Sakuraba… quelque chose ne va pas ?

—    Je… »

Les mots moururent sur ses lèvres. Takami était là lui aussi. Il se racla la gorge et se concentra sur Shin.

« Le bureau était ouvert lorsque je suis revenu, et je l’avais fermé.

—    En êtes-vous sur ? Demanda Ichiro en haussant les sourcils.

—    Certain Monsieur. »

Le trio s’observa avant que Shin reprenne.

« Avez-vous vérifiez les dossiers ?

—    Tout était en ordre Shin-san. Les coffres sont fermés. J’ai fait tout ce que vous m’aviez demandé sauf ses fichiers posés sur mon bureau. Mais, je n’aurais jamais imaginé que l’on fracturerait le bureau durant la pose déjeuner.

—    Je vais téléphoner au concierge pour faire faire de nouveaux jeux de clefs. Takami-san, je vous laisse… enfin, je pense que vous avez un entretien à mener.

—    Je vous remercie. Appelez la sécurité par la même occasion. Je ne laisserai pas ce genre de crime impuni. »

Puis se tournant vers Sakuraba, Takami remonta ses lunettes et déclara froidement.

« Je vous attends à mon bureau dans cinq petites minutes. »

Le secrétaire devint blême. Le nouveau directeur quitta la pièce. Shin avait déjà disparu dans son bureau, et il se retrouvait seul, face à sa détresse. C’était bon, il était viré. Abandonnant son masque d’impassibilité qu’il avait gardé jusque là, Haruto se crispa et jura entre ses dents. Il travaillait comme un dingue pour cette boite depuis qu’il avait été recruté. Il ne rechignait pas sur les heures sup’ et le boulot d’autres services en dépannage, et voilà comment on le traitait ?

Enfin, là il avait plus urgent. Haruto se reprit et quitta son bureau pour monter pour la première fois, dans celui du directeur. Gunpei Shoji lui adressa un regard de sphinx et l’invita à entrer dans le bureau de son patron. Tremblant, Sakuraba fit le moins de bruit possible et s’avança dans la pièce vide. Son regard balaya autour de lui, et il ne vit personne. Avait-il mal compris le message ?

Il ne su pas s’il était rassuré d’entendre la voix de Takami derrière lui.

« Je vous en prie, Sakuraba-san. Installez-vous, prenez un siège. Installez-vous confortablement… »

L’ironie du ton, hérissa les poils du secrétaire qui s’installa sur un siège face à Takami, qui prit place lui-même en croisant ses longues jambes, un verre d’alcool à la main. La décontraction avec laquelle, il l’accueillait mis les sens du jeune homme en alerte. De près, Takami semblait avoir dans les trente ans. Plus âgé que lui en tout cas.

« Avez-vous l’intention de me licencier, Monsieur ? » Attaqua Sakuraba très nerveux, surtout après la conversation téléphonique qui avait eut lieu la veille.

Takami en tous les cas paraissait très surpris qu’il prenne directement la parole.

« Cela dépend de vous. Répondit tranquillement son patron énigmatique.

—    De moi ?

—    En fait… Gunpai Shoji va suivre mon père durant son voyage, et je vais avoir besoin… d’un secrétaire. Shin-san ne se tari pas d’éloge à votre sujet…

—    Votre secrétaire ? »

Sakuraba eu l’impression que ses yeux allaient sortir de sa tête. Et que voulait dire ce « cela dépend de vous ? » avait-il oui ou non un poste à proposer ?

« Oui… mon secrétaire. En fait, vous êtes trois à qui je peux proposer ce poste. Anezaki Mamori et Manabu Yukimitsu. Tous les trois êtes les meilleurs éléments de cette société… Et je ne peux pas tous vous garder. Votre poste sera remplacé par un mi-temps auprès de Shin-san, et nous avons pensé à Karin Koizumi. Elle nous a demandé de réduire ses horaires de travail, et nous n’avons rien à reprocher à son poste. Cette situation nous arrange en quelque sorte. »

Un silence avait pris place dans la pièce. Seul  le doux tic-tac de l’horloge sur le bureau l’interrompait. Mais trop occupé à réfléchir, Sakuraba ne l’entendait pas. Son cerveau fonctionnait à toute vitesse. Il toussota et demanda.

« Suis-je le premier prévenu pour l’obtention de ce poste ?

—    Oui. »

Haruto plissa les yeux et observa son interlocuteur qui paraissait impassible. Pourtant, le jeune homme était sur qu’il s’amusait au fond de lui. Il ne comprenait pas pourquoi une telle promotion.

« Pourquoi me proposez-vous une telle place ? Ne vous ai-je pas…. Repoussé hier soir ?

—    Le terme fuir serait plus exact… Sakuraba-san. Vous êtes très compétents, quoiqu’Anezaki et Manabu soient plus intelligents que vous, si on regarde les diplômes, mais vous êtes dur à la tâche, et n’hésitez pas à donner de votre temps. De plus vous êtes très sérieux, et discret. »

Dit comme cela, Haruto se sentit rougir sous le regard de son patron. Pourquoi, avait-il le sentiment que quelque chose clochait ? Il observa longuement Takami qui posait à présent son verre sur son bureau en bois vernis. L’espace comportait déjà plusieurs dossiers en attente.

« Pourquoi me feriez-vous une telle faveur ?

—    Vous ne voyez vraiment pas pourquoi ? » Ironisa son patron en remontant ses lunettes.

Le sourire qui suivit fit frissonner d’appréhension Sakuraba. Se pouvait-il ?

« Je vois que vous commencez à comprendre… Ce poste pour vous comporte un petit plus… bien sûr, je vous paierez en conséquence…

—    Vous… vous… voulez que je me prostitue ?

Sakuraba en avait la voix éteinte.

« Le terme est un peu fort… mais après tout, si vous voulez sauvez votre place ici, et vu la promotion que je vous offre… j’estime que vous ne perdez rien au change. Juste m’accorder quelques faveurs de temps en temps… et votre place ici est assurée. Je vais vous laisser réfléchir… disons une petite heure. Téléphonez-moi pour me tenir au courant. »

Se penchant pour regarder Sakuraba droit dans les yeux, Takami eut un sourire en coin et déclara calmement.

« Si je n’ai pas de réponse d’ici là, je la considérerai négative. Dans ce cas, vous partirez en fin de semaine de notre entreprise. Koizumi-san prendra votre place lundi de la semaine prochaine avec ses nouveaux horaires. Maintenant, je vais vous laisser, Sakuraba-san… j’ai d’autres personnes à recevoir d’ici ce soir. Inutile de vous déplacez, j’attends votre coup de fil. »

Takami se plongea dans ses papiers, et Sakuraba le cœur battant se redressa et quitta le bureau. Il prit soin de ne pas claquer la porte, Gunpei l’observait de son regard pénétrant et il n’avait pas envie de craquer là, devant lui. Sakuraba se dirigea vers les toilettes, il avait besoin de s’isoler.

°°0o0°°

La porte a peine fermée, Takami se rejeta sur son fauteuil et retira ses lunettes. Il venait de jouer à quitte ou double ! Mais qu’est-ce qu’il foutait ! Ce poste était pour Sakuraba et toute l’histoire qu’il avait inventée autour n’était que du vent… pour le faire craquer. Devait-il vraiment être amoureux et surtout désespéré pour faire n’importe quoi ?

Se levant brutalement de son siège, il se plaça devant la baie vitrée qui donnait sur l’immense parking et les entrepôts qui constituaient l’entreprise qu’il connaissait depuis sa plus tendre enfance. Le regard angoissé de Sakuraba l’obsédait… pourtant lorsqu’ils avaient fait l’amour ensemble, l’échange avait été passionné. Il lui avait avoué son amour… Le fait qu’il l’observait de loin depuis qu’il avait intégré la société, devenant par la même un stalker discret certes. Alors la veille, il avait reçu une véritable gifle.

C’était peut-être par vengeance qu’il lui proposait cette situation, ou bien… parce qu’il le désirait à en perdre la raison ? Comme il avait brûlé de le contacter, mais ses obligations le tenaient vraiment trop loin de Tokyo. Posant son front contre la vitre fraîche, Takami songea qu’il avait joué son va tout… de toute façon, Sakuraba ne lui céderait pas à nouveau. Il avait vu la peur dans son regard à plusieurs reprises.

S’il devait tout perdre autant que cela soit pour une bonne raison… il aurait tout tenté ! Maintenant, si Sakuraba acceptait… comment agirait-il ? Il n’avait pas songé à cette éventualité, persuadé au fond de lui qu’il refuserait cette proposition indécente. Mais qu’est-ce qu’il faisait ? Il ne pouvait de toute façon plus faire machine arrière. Les dès étaient jetés.

Un appel interne le fit sursauter. Retournant à son bureau préoccupé, Takami entendit la voix de Gunpei lui signifiant l’arrivé de Marco à son bureau. Sa journée difficile ne faisait que commencer !

°°0o0°°

Sakuraba observait sa montre nerveusement. Que devait-il faire ? Son cœur lui disait de refuser, mais sa raison accrochée à son porte monnaie et surtout à l’avenir incertain qui l’attendait lui faisait taire ses scrupules. Shin ne vint même pas le voir, déborder par les appels internes. Les minutes s’écoulaient et quoiqu’il fasse, le marché lui paraissait de plus en plus séduisant ou écœurant… en fonction de sa raison ou du message que lui envoyait son cœur. Il ne savait plus trop où il en était à présent.

Le visage de Takami s’imposa à lui. Il était loin d’être moche… même lui pouvait le reconnaître. Mais… mais subir cela, selon la volonté de ce type… Jamais plus, il ne pourrait se regarder dans la glace. Toutefois, comment ferait-il pour survivre ? Demander de l’argent à ses parents… c’était impossible. Leurs moyens étaient modestes, et il n’était pas fils unique. Le visage de Mamori s’imposa à lui. Que lui dirait-il à elle ? Il ne savait plus…

À moins que… qu’il accepte et qu’il cherche un travail en parallèle afin de se sortir de ce guêpier ? Il n’avait pas franchement le choix. Il ne voulait pas perdre la face. Ce marché était dégradant pour lui, mais aussi à celui qui lui avait proposé. Qui pourrait croire que derrière ses manières composées, ce type puisse faire ce genre de proposition ? Pour Mamori, il se cacherait, ou trouverait des excuses… Il devait éviter aussi Hiruma. Pourvu que son patron le vire !

Sakuraba hésita encore, mais en voyant son heure de réflexion s’achever, il composa le numéro de Takami Ichiro. Il ignora délibérément son cœur qui battait si fort qu’il l’empêchait de penser. En quelque sorte… c’était une bénédiction. Avec un peu de chance, il n’entendrait même pas les paroles qui s’apprêtaient à déclarer.

°°0o0°°

Futoshi Omodanake lui faisait face. Takami soupira. Il ne comprenait pas comment ce type avait réussi à se faire embaucher… Il ne faisait véritablement aucun effort. L’homme avait oublié la proposition qu’il avait faite à Sakuraba depuis un moment. Le stress des entretiens l’accaparait totalement. Alors il fut surpris d’entendre sa voix, lorsqu’il décrocha son téléphone en s’excusant auprès de son interlocuteur.

« Takami-sama…

—    Oui ?

—    J’accepte votre proposition. Je commence quand exactement ?

—    Lundi matin.

—    Très bien. Cela me laisse le temps de clôturer mes dossiers. »

Avant qu’il ne puisse répondre, Sakuraba avait coupé la communication. Takami resta figé. Que venait-il de se passer là ? Sakuraba avait accepté ? Ichiro leva les yeux et rencontra le visage bouffi de Futoshi, il devait finir son entretien, mais son cœur battait si lourdement à présent qu’il se demanda comment il allait finir tous ses entretiens ? Il était saisi et pris à son propre piège…

Malgré sa déstabilisation, Takami réussi à finir son entrevue, et s’accorda une pause. Sakuraba Haruto était à sa merci ! Il n’était pas heureux… il aurait voulu… il aurait voulu qu’il l’aime autant que lui pouvait l’aimer. À moins qu’il ne le rende amoureux ? Après tout, il allait pouvoir en avoir l’opportunité à présent. Il n’y avait plus d’urgence. Soulageant sa conscience, Ichiro termina son après-midi calmement… Les choses finiraient par s’arranger certainement… enfin, peut-être.

 

 

 

 

Chapitre 3

 

Le week-end sembla très long à Ichiro, et en même temps très rapide. Il avait compulsé un tas de dossiers durant ses deux jours de repos. L’image de Sakuraba lui revenait sans cesse en tête. Avait-il eu ce même regard hagard lorsqu’il lui avait téléphoné ? Ses yeux avaient souvent dérivé sur son portable, mais à chaque fois, il se résolvait à étudier les notes qu’il avait prit pour s’avancer. Reprendre l’entreprise familiale quasiment au pied levé n’était pas aisé. D’autant que son père, était un bourreau de travail.

De plus, ses nuits n’étaient pas pour autant reposantes. Nerveux à l’idée d’échouer à ce test grandeur nature que lui imposait Ichizo, Ichiro se réveillait souvent en sursaut. Lorsque le lundi matin se présenta, il était doublement sur les nerfs. Est-ce que Sakuraba avait cru à ses paroles ? Passant devant l’accueil, il traversa le hall spacieux, aux couleurs blancs et gris notamment dû à l’ardoise posé au sol, et aux reproductions de toiles de Maîtres Contemporains accrochées aux murs. De nombreuses vitrines éclatantes exposaient la vaisselle fabriquée dans l’usine toute proche.

Takami fut rejoint par Shin qui, toujours imperturbable déclara de but en blanc.

« Ce n’est pas bien de jouer avec les sentiments des autres.

—    Ne me fais pas de leçon de morale… et je te demanderai de rester discret. Quoique je n’aie pas embauché Sakuraba pour les raisons que tu crois.

—    … »

Le regard éloquent ou… non éloquent de son ami, l’agaça. Ils se connaissaient depuis la primaire et avait toujours fréquenté les mêmes classes. Complices depuis toujours, le responsable des ressources humaines était le meilleur ami de Takami, et surtout son confident. Même si Sejuro Shin n’était pas bavard la plupart du temps, ses conseils s’avisaient toujours justes lorsqu’il consentait à en donner un. Il était aussi le seul à connaître son homosexualité.

« Je te souhaite une bonne journée Takami-san. Soit prudent… »

Takami jeta un regard surpris sur son ami, mais Shin disparaissait au détour d’un couloir. Haussant les épaules, Ichiro traversa son couloir et entra dans le bureau occupé par Sakuraba… enfin, quand il arriverait à son poste. Plus aucune trace des affaires de Gunpai Shoji. La pièce lui paru bien vide. Ses yeux parcoururent le bureau imitation merisier, et le téléphone qui trônait dessus. Les portes de placards encastrées dans les murs ne laissaient voir aucun désordre. La pièce était austère.

Se dirigeant vers le fond du bureau, il ouvrit une porte qui donnait sur le sien, et la laissa ouverte. Posant sa mallette sur le coin de son nouveau bureau, Takami respira de grandes goulées d’air. Il ne devait pas paraître nerveux, mais sur de lui ! C’est ce que tout employé attendait de son patron.

Puis, Ichiro s’installa à sa place et sorti son matériel, s’appliquant à le ranger correctement. Lorsque le téléphone sonna, il sursauta de surprise. Son cœur battait à fol allure. Qui pouvait déjà le contacter à cette heure-ci ? Takami reconnu le numéro de son père.

« Ichiro… Je voulais savoir, si tout allait bien ?

—    Merci père, tout va très bien. En fait, je n’ai pas encore fait grand-chose…

—    Je compte sur toi ! Si tu as besoin d’aide, n’hésite pas à m’appeler ou bien Gunpei-san.

—    Le cas échéant oui, mais pour l’instant… je n’ai besoin de rien.

—    Comme tu veux. Soit ferme avec les employés, et ne te laisse pas manipuler…

—    Je ferai de mon mieux.

—    Bien, bien… Je te contacterai en fin de semaine.

—    Très bien père. »

Takami vit la porte de son bureau s’ouvrir, et la silhouette de Sakuraba se dessina dans l’embrasure. Visiblement, il ne savait pas quel comportement adopté. Takami fit un geste de la main pour l’inviter à entrer.

« Je vais vous laisser père… J’ai une réunion ce matin avec les cadres de l’entreprise. Je vous tiens au courant s’il y a quoi que ce soit d’important. »

Après avoir raccroché, Ichiro reporta son attention vers son nouveau secrétaire, qui paraissait terriblement mal à l’aise, malgré l’assurance qu’il tentait d’afficher.

« Bonjour Sakuraba-san…

—    Bonjour, Takami-shachō[i]. » Lui répondit-il respectueusement toujours sur la défensive, malgré son ton amical.

—    Ce matin se tient une réunion à 10h30. J’aurais besoin que vous prépariez la salle. J’ai ici un rapport à photocopier pour chaque intervenant. Pourriez-vous préparer le rétroprojecteur également. Je vous ai fait une copie de mon agenda, je l’ai transférer sur votre ordinateur. Je vous demanderai de préparer les autres réunions et déplacements qui auront lieux au cours des deux prochaines semaines. Je pense que Genpei-san a dû vous laisser son carnet d’adresses personnelles dans son bureau. Pour le reste… nous verrons au fur et à mesure.

—    Bien.

—    Je vous demanderai de prendre des notes, et d’en faire un compte-rendu. »

Takami continua à donner ses instructions. Lorsqu’il eut terminé, il renvoya Sakuraba qui se tenait droit comme un « I ». Seul, Ichiro poussa un soupir entre ses dents. Son regard avait eu grand peine à ne pas le déshabiller. Le fait que son secrétaire soit aussi gêné, lui donnait un air véritablement adorable, auquel il résistait difficilement. La cohabitation serait rude pour lui.

Dans quoi s’était-il lancé en fait ? Quoiqu’il en soit, il était trop tard pour changer le poste de Sakuraba. Koizumi-san avait obtenu le poste de secrétaire de Shin. Mais quel crétin, il pouvait-être lorsqu’il s’y mettait ! Il se rejeta en arrière sur son siège et ferma les yeux quelques minutes avant de se plonger dans son travail. Il n’avait pas le temps de rêvasser.

°°0o0°°

La salle de réunion se vidait peu à peu. Les conversations allaient bon train, et le brouhaha laissa place bientôt au silence. Seul restait en place Sakuraba qui rangeait le matériel pour restituer une salle de réunion nette. Prenant son ordinateur portable, et son bloc note lorsqu’il en fini, il s’arrêta en voyant Hiruma adossé au chambranle de porte.

« Sakuraba-san ! » S’exclama le responsable commercial tout sourire. « Vous avez l’air de bien vous porter depuis votre mutation à votre nouveau bureau. »

Haruto devint blême. Il avait complètement oublié sa conversation avec Hiruma Yoichi ! Même ses photos… Comment avait-il fait ? Tout son corps se raidit, alors que le commercial fermait la porte derrière lui, alors qu’il s’avançait dans la pièce, un sourire prédateur sur les lèvres.

« Que me voulez-vous ? Et pourquoi fermez-vous cette porte Hiruma-san ?

—    Vous vous souvenez de notre petite conversation ?

—    …

—    Je vois… Sourit un peu plus largement Hiruma. Mais apparemment vous n’avez pas compris mon avertissement.

—    Avertissement ? À quel sujet ?

—    Mamori Anezaki. 

—    C’est ma petite amie.

—    Plus pour longtemps. Ricana Yoichi.

—    Je n’ai pas à céder à pareil chantage ?

—    Même si cela implique notre cher nouveau patron ?

—    Pardon ?

—    Mes menaces ne sont pas à prendre à la légère… Imagine les répercutions si cela se savait dans l’entreprise, mais surtout en dehors…

—    Vous n’oseriez pas !

—    Tu veux essayer ? »

Haruto resta figé. Le sourire d’Hiruma s’était effacé. Jusqu’ici, il n’avait pas céder à se chantage, mais là les choses se compliquaient manifestement.

« Je t’ai dit d’abandonner Sakuraba, mais t’es un fucking emmerdeur !

—    Je crois que nous n’avons plus rien à nous dire. » Conclut Sakuraba.

Son cœur battait lourdement, mais il ne montra qu’un visage de glace. Il passa devant le commercial et ferma la porte derrière lui. En relevant la tête, il croisa le regard de Takami. Ce dernier allait lui parler, mais la porte de la salle de réunion s’ouvrit derrière Haruto, et laissa voir Hiruma Yoichi. Sakuraba se tourna vers lui, et le foudroya du regard, à sa grande surprise, ce dernier lui envoya un clin d’œil, et une moue suggestive, le figeant.

Hiruma déclara d’une voix chaleureuse et sensuelle.

« À bientôt, Haruto… »

Choqué, Sakuraba ne répliqua rien, le regardant s’éloigner médusé. Lorsqu’il se tourna vers son patron, ce dernier le fixait d’un air indéfinissable. Takami fit demi-tour et quitta les lieux. Le cœur de Sakuraba se mit à battre plus fort. Etait-ce son imagination, ou son patron avait froncé les sourcils lorsqu’il s’était détourné ?

Cela faisait un mois qu’il était à son service. Il ne s’était passé strictement rien entre eux, depuis le début de leur collaboration. En fait, ils étaient débordés de travail. Takami quittait son bureau bien après son départ. Haruto respira et se dit qu’il avait imaginé sa mauvaise humeur. Il retourna à son bureau. Il songea brutalement à ses conditions d’obtention de poste… Se fut lui, qui se rembrunit. Jusqu’ici il avait occulté ce fait, oubliant même son aventure d’un soir… quoiqu’il n’ait pas les idées très claires sur le sujet.

Entrant dans son bureau, Sakuraba posa ses affaires sur le bureau. Son après-midi se passa sans nuages particuliers. Tant et si bien qu’il en oublia sa rencontre avec Hiruma, et l’attitude déconcertante de son patron…

En fin d’après-midi alors que le soleil déclinait, et que la plupart des employés avaient quitté le bureau, Sakuraba fermait son tiroir à clef avant de les ranger dans sa poche intérieure de veste. Il se pencha pour récupérer son sac, lorsqu’un corps immense recouvrit le sien, une haleine chaude se faisait sentir dans son cou.

« Sakuraba Haruto… »

Cette voix, le jeune homme la connaissait. Son corps se crispa et sa respiration se fit plus courte. Que lui voulait son patron ?

« Takami-Shachō ? Interrogea d’une voix éteinte Haruto.

—    Vous souvenez-vous des termes de notre accord ?

—    Je… je… »

Une main large glissa sous sa veste, rampant pour caresser ses abdominaux sensuellement. Une langue vint chatouiller l’ourlet de son oreille, le faisant frémir d’effroi.

« Moi, je n’ai pas oublié… et il est temps pour vous, de commencer à vous acquitter de notre accord. »

La main le força à se redresser, alors que Takami en faisait autant. Sakuraba se sentit obliger de se tourner, et il croisa un regard dur, derrière les lunettes rectangulaires. Visiblement Ichiro Takami ne plaisantait pas. Ses doigts remontèrent le long de son corps, pour s’arrêter sous son menton, l’obligeant à rester en place. Le visage de Takami s’approchait dangereusement. Son souffle caressait ses lèvres. La peur s’insinua chez Haruto. Il allait mettre ses menaces à exécution.

« Je ne vois pas pourquoi vous accorderiez vos faveurs à Hiruma-san, alors que rien ne vous lie. Je pensais que vous étiez hétéro et je pensais prendre mon temps pour vous séduire, mais visiblement vous n’en avez pas besoin… »

Sakuraba voulu protester, et s’expliquer sur le malentendu, mais la bouche de son patron se posa sur la sienne. Haruto eu un geste de recul, cassant provisoirement le baiser. La lueur sinistre dans le regard de Takami, le tétanisa, et lorsque les deux mains se placèrent sous ses fesses le ramenant de force contre la poitrine large de son patron, Sakuraba était blême.

Les lèvres impérieuses reprirent les siennes. Le baiser était dur, et les mains qui le plaquaient contre son patron, ne lui laissaient aucune chance de s’échapper. Toutefois, Sakuraba chercha à se défaire de l’étreinte forcée. Le portable de Haruto sonna, brisant les halètements de lutte. Immédiatement, Takami le lâcha, et s’écarta.

« Répondez ! »

Surpris Sakuraba leva les yeux vers son patron. Il fixait la porte qui donnait sur le couloir, voulant entendre la conversation, sans aucun doute. D’une main tremblante, Haruto décrocha. Toutefois sa voix ne trahissait aucune émotion.

« Sakuraba…

—    Haruto ! Qu’est-ce que tu fiches ? Je t’attends depuis une demi-heure. Tu m’avais dit que tu ferais un effort ce soir.

—    Mamori, je suis désolé… je… je sors tout de suite. J’ai eu un dernier problème à régler, mais j’ai terminé. Attends-moi.

—    Dépêche-toi ! »

Sakuraba se tourna à nouveau vers son patron, qui remontait du bout des doigts ses lunettes. Son attitude n’exprimait rien de particulier.

« Puis-je partir Takami-Shachō ?

Après un court silence, où son président l’examina, Takami répondit :

« Ne crois pas que nous en resterons là. Tu as une dette à régler, mais tu peux partir… »

Sakuraba ne demanda pas son reste, et ramassa son sac qu’il avait laissé tomber. Ses jambes tremblaient… en fait, tout son corps était secoué de frissons. Dans l’ascenseur où il était seul, le jeune homme se laissa aller contre la paroi, le front collé sur la cage fraiche. Il devait se remettre les idées en place. Se regardant dans le miroir du fond, il remarqua ses lèvres humides et légèrement rosées.

Il les essuya d’un geste brusque. Lorsqu’il sorti de l’ascenseur, il offrait un visage plein d’assurance. Mamori apparu à ses côtés, l’air interrogative.

« Tu as eu des ennuis ? Tu parais si sérieux…

—    Ce n’est rien… Je crois que j’ai besoin de décompresser, la journée a été rude.

—    Oh ne m’en parle pas. Si tu savais combien récupérer un simple rapport d’activité auprès d’un commercial peut-être épuisant. Ils s’inventent toujours des excuses. »

Sakuraba écouta distraitement les paroles de l’assistante commerciale. Son regard effleura la façade de l’entreprise, et il cru voir la silhouette haute de Takami Ichiro. Un frisson de dégout le traversa.

°°0o0°°

Takami observa les deux silhouettes montées dans la voiture de son secrétaire. Sa gorge se noua. Un goût de cendre lui restait sur la langue. Jamais il ne serait cru capable d’une telle infamie. Mais l’attitude d’Hiruma l’avait fait voir rouge. C’était une véritable torture de travailler avec Sakuraba. De nombreuses fois, il avait failli lui caresser la joue, ou l’embrasser de manière intempestive…

Au lieu de cela… il avait franchit une ligne bien pire que tout ce qu’il avait imaginé. Quoique, c’était lui qui avait inventé ce marché stupide. Éprouvait-il du remord au moins ? Son cœur se mit à battre plus fort. Même pas. Il avait aimé l’embrasser, même si Sakuraba tentait de se défendre.

En fait, cela l’avait littéralement excité. Son corps chaud contre le sien… l’avait émoustillé. La lueur combative dans le fond de son regard malgré sa peur, lui laissait présager de long moment de lutte.

Finalement, il était préférable d’avoir cet angle de rapport. Il aurait certainement moins de remords en ayant à batailler, plutôt que d’avoir affaire à une simple victime qui s’abandonnerait. Ce genre de comportement l’aurait certainement fait céder.

°°0o0°°

Le lendemain, Haruto franchit le seuil de son bureau le cœur battant. Maintenant, ses journées au bureau ne se passeraient plus tout à fait dans la même sérénité. Posant son sac à côté de son bureau, le secrétaire alluma son MAC, et répondit au premier coup de fil de sa journée. La porte du couloir s’ouvrit et Takami Ichiro passa devant lui, accompagner de Shin Seijuro. Les deux hommes le saluèrent comme si de rien n’était.

Soulagé pour quelques minutes, Sakuraba se concentra sur son travail. La matinée se passa sans incidents notoire. Visiblement son patron avait autres choses à penser qu’à la bagatelle. Toutefois, lorsqu’il entra dans son bureau avec son trieur pour faire signer les courriers, Sakuraba prit soin de se trouver le plus loin possible de son patron, et ses mains ne s’attardèrent pas sur le dossier posé sur le bureau. Takami ne semblait pas avoir remarqué son manège, se contentant de le congédier d’un geste alors que son téléphone sonnait.

Haruto ne demanda pas son reste et s’éloigna. Une fois devant son ordinateur, il posa son front contre sa paume et soupira irrité. Peut-être devait-il donner sa démission ? Il songea alors à ses nouvelles conditions de vie. Son salaire avait augmenté, et il avait commencé à faire quelques travaux urgents dans son appartement pour le rendre plus confortable. Et puis, il avait promis d’aider ses parents pour l’achat d’un nouveau chauffage. Il ne pouvait plus reculer. La période était trop dure pour trouver un nouveau travail, surtout qu’il était jeune diplômé.

Les heures s’écoulèrent trop lentement au goût d’Haruto. Tous les prétextes pour quitter son bureau étaient bons à prendre. Même si Takami ne tentait rien, son regard le brûlait dès qu’il se posait sur lui.

En fin d’après-midi alors qu’il s’apprêtait à sortir, son téléphone sonna. Haruto reconnu le numéro de poste qui s’affichait. Son cœur se mit à battre furieusement. Décrochant à contre cœur, le secrétaire répondit

« Takami-Shachō que puis-je pour vous ?

—    Venez dans mon bureau…

—    Mais… je… j’ai un rendez-vous.

—    Je n’en aurais pas pour longtemps. 

—    Bien… J’arrive tout de suite. »

Sakuraba posa le combiné, et resta une seconde figé avant de prendre sur lui, et d’entrer dans le bureau de son patron. Il avait laissé la porte ouverte, Takami qui était assis confortablement dans son fauteuil de direction, fit un geste de la main, et déclara moqueusement

« Veuillez fermer la porte. »

Le cœur de Sakuraba se mit à battre beaucoup plus fort. Son patron lui demanda d’avancer, en remuant son index vers lui pour le faire avancer.

« Je ne vous retarderez pas… mais, veuillez prendre vos dispositions pour que nous puissions avoir au moins une heure devant nous Sakuraba-san. Aucune excuse ne sera tolérée. »

Haruto se tenait debout, très droit, les mains moites. Son attitude générale était crispée. Takami décroisa les jambes et montra une bosse sous l’étoffe de son pantalon. Un fin sourire se forma sur ses lèvres.

« J’ai besoin d’être soulagé. Je vous demanderai de vous appliquer…

—    Je… je dois… que…

—    Une pipe ! Exactement… Sakuraba-san. »

Takami prit soin d’écarter les jambes pour laisser du passage à Sakuraba. Ce dernier essaya de faire face à sa panique. Après tout… ce n’était pas si terrible que cela. Il pouvait le faire…

« N’oubliez pas votre rendez-vous Sakuraba-san… »

La gorge nouée, Haruto se mit à genoux. Le membre gonflé sous le pantalon, lui parut énorme. Les mains légèrement tremblantes, il posa ses mains sur le ceinturon en cuir, et le défirent avec lenteur.

« Auriez-vous besoin d’aide Sakuraba-san ? »

La réflexion lui fit lever les yeux. Le regard ironique, et la pause nonchalante de cet homme l’exaspéra. La colère aidant, Haruto défit le bouton, et la braguette prestement. Ouvrant le plus largement possible les pans, il se trouva face à un boxer… et Haruto retint sa respiration. Il n’allait pas être capable de le faire.

Mais sentant le regard de son patron le sonder, et ne voulant pas lui laisser croire qu’il était couard, il chercha sous le tissu la verge dressée. Lorsqu’il la sortie, il déglutit. Elle était épaisse et longue. Jamais, il ne pourrait l’engloutir en entier, et brusquement une certaine douleur vint se rappeler à lui. Il comprenait mieux pourquoi il avait eu si mal durant quelques temps.

Sa bouche se posta à quelques centimètres du sexe dressé et s’arrêta. Il leva les yeux, et rencontra le regard d’obsidienne de Takami aux travers des lunettes. La lueur dans son regard indiquait qu’il ne croyait pas un instant qu’il franchirait le pas. Haruto se pencha et avala le sexe de son patron, et fit un va-et-vient.

Rouge de honte et mortifié, il le suça maladroitement. C’était sa première fois, et cette sensation étrange dans sa bouche, était désagréable.

« Plus doucement… et cessez de me griffer avec vos dents. C’est du plaisir que vous devez me donner Sakuraba-san ! »

Surpris par ses paroles, Haruto leva les yeux et croisa le regard furieux de son patron.

« Auriez-vous besoin d’un cours ? »

L’intonation sèche le surpris. Il en lâcha le membre turgescent, et fixa son patron qui remontait nerveusement ses lunettes. Il voulait du plaisir ? Haruto se pencha à nouveau vers la verge et la saisit d’une main. Il lécha le gland, et leva les yeux vers son patron, et vit qu’il déglutissait. Takami lui semblait soudain plus nerveux. Son air moqueur avait disparu. Il le regardait faire comme hypnotisé.

Curieux de voir jusqu’où il pouvait troubler son patron, Haruto se concentra, et sans quitter du regard Takami, il caressa la base de son sexe, tout en suçant le bout de sa queue. Takami gémit faiblement. Remarquant son manque de tenu, il essaya de reprendre un masque impassible. Sakuraba n’allait pas le laisser faire. Même s’il n’aimait pas ce qu’il faisait, avoir un tel pouvoir sur un homme supérieur à lui, l’excitait.

Il observa les réactions de Takami alors qu’il enfonçait de plus en plus profondément son sexe dans sa bouche. Ce dernier bougeait doucement à présent, l’étranglant un peu au passage. Le regard de Takami ne quittait pas le sien, et ses pupilles qui s’agrandissaient sous le désir, lui fit battre le cœur. Une main douce, vint se poser sur le haut de son crâne, caressant doucement ses mèches.

Brusquement, Haruto s’aperçut que son sexe s’était tendu sous l’excitation. Il se sentait à l’étroit dans son pantalon. Il en fut troublé.

« Caresse-toi aussi… »

Haruto s’aperçu que Takami avait vu le chemin qu’avait emprunté sa main inconsciemment.

« Fait-le ! » Ordonna-t-il.

Sakuraba défit d’une main sa ceinture, et les boutons de son pantalon. Le sexe entre ses lèvres durcissait encore. Sa respiration se fit plus rauque, tout comme celle de Takami qui ne le caressait plus, mais regardait le chemin qu’empruntait sa main au travers du pantalon. Ne voyant visiblement rien, il gémit sensuellement

« Baisse ton froc ! »

Excité brutalement d’être vu en train de se branler. Haruto lâcha le sexe de son patron, et baissa son pantalon, dévoilant sa propre verge dressée. Le secrétaire se pencha à nouveau et suça avec application le sexe devant lui, le léchant, le gobant, l’astiquant, alors que son autre main serrait son sexe et soulageait la tension qui l’habitait.

Le plaisir montait au creux de ses reins. Sakuraba songea qu’il aurait du se sentir honteux, mais là, un plaisir qu’il ne connaissait pas, excitation coupable de l’interdit peut-être ? Il vit le corps de son patron se tendre alors que lui-même sentait le sperme monter. Lorsque celui de Takami jaillit, une main le tint fermement en place, le forçant à l’avaler. La chaleur brulante du sien traversa sa chemise.

La respiration courte, et une odeur de sexe inédite dans ce lieu, le laissa pantois. Tout comme ce goût âcre qui lui enflammait la gorge. Haruto leva les yeux vers Takami qui se pencha pour l’embrasser, et ainsi récupérer le sperme qui couvrait sa bouche et sa joue. Sakuraba se laissa faire, en fermant les yeux. Il avait l’impression d’avoir mis un pied dans un engrenage duquel il aurait du mal à sortir.

« Vous voyez que cela n’est pas si difficile, Sakuraba-san… Je pense que nos rencontres seront des plus plaisantes. »

Sakuraba s’était reculé promptement, voulant se donner de l’espace. Il se réajusta, et vit que Takami faisait de même. Son air moqueur était réapparu. Malgré son dégoût, Haruto demanda.

« Avez-vous besoin d’autre chose ?

—    Vous pouvez disposer, Sakuraba-san. »

Sans se retourner le secrétaire quitta la pièce, le plus naturellement qu’il lui était possible. Dehors, il regardait sa main horrifié. Il s’était branlé devant son patron ! Et il… il… il l’avait… Haruto sorti précipitamment pour rejoindre les toilettes. Il se rinça la bouche abondamment comme pour effacer ce qu’il venait de faire.

Une heure plus tard, il était en compagnie de Mamori et l’embrassait. Il l’enlaça contre lui, voulant se perdre dans cette étreinte. Sa langue cherchait avec délectation sa jumelle douce, et rassurante. Rien à voir avec les baisers de Takami qui étaient exigeants, et durs…

Mamori le repoussa gentiment, en riant devant tant de passion.

« Hey ! Haruto… ne soit pas si… si…  

—    Si ? » Reprit Sakuraba, la fixant avec intensité.

Mamori devint écarlate sous le feu de son regard. Elle toussota et demanda la voix légèrement enrouée.

« Ça te dirait de venir chez moi cette nuit ? »

Le visage de Sakuraba s’éclaira d’un sourire. C’était la première fois, qu’elle lui faisait se genre de proposition. Pour toute réponse, il chuchota

« On prend ta voiture, ou la mienne ? »

Mamori glissa son main sous son bras, et eut un petit sourire.

« La tienne… »

Sakuraba entraina sa petite amie hors du centre commercial où ils s’étaient donné rendez-vous, lieu proche du restaurant où ils devaient commencer la soirée. Ni l’un, ni l’autre ne remarquèrent deux yeux haineux qui auraient pu les transpercer par leur colère.

 



[i] Shachō : président.

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